culture

 

Collectif "Les lesbiennes dépassent les frontières"

Faina Grossman – Paris France

 

LLDLF

Les lesbiennes dépassent les frontières est un collectif de lesbiennes féministes qui est né à Paris en 2011. Vous avez choisi de fonctionner sous forme de réseau et pas sous forme d’association.

Ses bases politiques :

- lesbiennes, nous avons reçu des autres lesbiennes la force de nous battre et de lutter pour notre autonomie;

- vivant ici, étant arrivées un jour, nous sommes réunies pour accueillir celles qui arrivent en France et sont isolées et illégalisées, devenues demandeuses d’asile ou sans papières;

- nous refusons de cautionner la fermeture des frontières et les lois européennes répressives limitant la venue des non-européennes sur ce territoire;

- étant lesbiennes, nous sommes en danger dans nos pays, nos régions, nos familles et nous voulons pouvoir choisir de vivre là où nous nous sentons le plus en sécurité, là où nous pourrons nous re-construire en espérant vivre enfin, autonomes et libres;

- ce réseau est là pour que la solidarité circule et rende plus fortes toutes les lesbiennes qui s’y côtoieront. Nous sommes soucieuses de structurer une solidarité entre lesbiennes efficace rapidement et sur le long terme.

Unissons-nous pour qu’aucune d’entre nous ne ressente plus ni l’isolement ni l’incapacité d’agir.
Tant que toutes les lesbiennes ne sont pas libres et autonomes, aucune ne l’est !

Voilà pour les principes et concrètement qu’est ce que vous avez réussi à mettre en place ?

On pensait créer un réseau de solidarité autour des besoins concrets comme le logement… Et surtout entrer en contact les unes avec les autres et ouvrir des portes vers nos réseaux lesbiens respectifs. Car à Paris existe ARDHIs, une association LGBT qui s’occupe des dossiers des demandeuEs d’asile. Nous cherchons à être complémentaires.

Nous nous impliquons dans les démarches administratives Pôle Emploi, la CMU, la demande de réduction pour le transport mais nous nous sommes rendues compte que nous devons aussi nous impliquer dans les dossiers, et donc nous constituons les dossiers et nous veillons à la cohérence du récit. Car en tant que lesbiennes nous pouvons apporter des choses fondamentales. Par exemple :

Détecter les stéréotypes dans les dossiers, en particulier la partie où elle doit raconter son histoire personnelle pour prouver qu’elle est lesbienne et persécutée pour son lesbianisme et qu’à ce titre elle a droit à l’asile. C’est soit unE bénévole de l’Ardhis ou une assitante sociale qui contribue à l’écriture de ce récit, donc pas forcément une lesbienne.

Comme il est difficile de prouver qu’on était lesbienne, il ne reste plus qu’à prouver qu’on l’est aujourd’hui. La participation au Réseau lesbien tient lieu de "preuve". On multiplie les photos, les attestations, les invitations à des activités… On essaie d’assurer une présence à l’Ofpra et à la CNDA pour attester de cette existence du réseau lesbien.

Concrètement, nous gérons un fonds de solidarité alimenté par des cotisations mensuelles ou ponctuelles pour faire face aux besoins urgents et indispensables : un toit, de quoi se nourrir, la carte de transport et le téléphone.

Une permanence mensuelle rassemble le réseau, c’est-à-dire nous toutes.

Que ce réseau fonctionne sur le fait que chacune apporte ce qu’elle peut et quand elle le peut permet de tenir sur la distance. En plus, la confiance est là, qui permet de compter les unes sur les autres et de ne pas se sentir dépassée ou engloutie dans ces démarches éprouvantes pour toutes de la demande d’asile.

Vous vous êtes lancées dans des actions au niveau institutionnel, quelle en est la raison ?

L’un de nos objectifs aujourd’hui est de dénoncer les préjugés des institutions come l’OFPRA et la CNDA qui, selon nos observations, rejettent fréquemment comme non lesbiennes, les lesbiennes qui ont été mariées et qui ont eu des enfants. Nous voulons leur faire comprendre que le mariage et les enfants qui en résultent sont souvent, ailleurs comme ici aussi parfois, le résultat de la contrainte à l’hétérosexualité et que ça ne peut en aucun cas être évoqué pour contester le fait d’être lesbienne.

Question : comment faire pour créer des relations de solidarité qui nous nourrissent les unes des autres et qui cassent les barrières construites par les états, les cultures et les situations très inégales dans lesquelles on se trouve aujourd’hui ?

Question : on s’est rendu compte qu’il faut qu’on soit toujours plus nombreuses pour inventer de nouvelles formes d’organisation pour construire cette solidarité. Que ce soit pour les demandeuses d’asile ou pour toutes les lesbiennes en général, c’est un enjeu de construire de nouvelles formes de solidarité même si nous avons bien conscience de ne pas être un groupe homogène et que nous sommes traversées par des rapports de pouvoirs entre nous.